L’art de la procrastination (structurée)

J’ai décidé de vous parler aujourd’hui d’un petit livre qui devrait être mis entre les mains de tous les procrastinateurs. Ce petit manifeste du philosophe John Perry est en effet un plaidoyer très convaincant, et donc déculpabilisant, sur ce qu’il appelle la procastination structurée. On pourrait presque le sous-titrer l’art de la fausse glandouille.

Je le dis sans aucune honte, je suis un procrastinateur. Cet article est d’ailleurs le produit de ce trait de caractère. Cela fait pas mal de temps que je voulais l’écrire, depuis l’été dernier en fait, puisque j’ai fini le livre à la fin de l’été. Et maintenant que je l’écris, je sais qu’il serait plus raisonnable de travailler sur autre chose car j’ai des formations, cours et conférences qui se profilent dans quelques jours. La logique serait donc que je travaille plutôt sur ces sujets importants et urgents. Mais, comme le dit l’auteur dans les premières lignes de son livre, j’écris cet article pour ne pas avoir à travailler sur le reste.

Je suis ainsi typiquement ce que John Perry appelle un « procrastinateur incurable mais structuré, capable d’abattre une formidable quantité de travail. » Si procrastiner est remettre au lendemain ce que l’on devrait faire le jour même, la procrastination structurée est l’art d’en tirer profit.

Automanipulation et mauvaise foi

Le propos du philosophe n’est d’ailleurs nullement de supprimer la procrastination et encore moins de réduire le nombre tâches que nous avons à faire à seulement celles qui nous intéressent. Son propos est plutôt de nous adapter à ce comportement, en maniant, mauvaise foi et automanipulation.

Pour lui, nous ne sommes pas des personnes rationnelles qui prennent les choses l’une après l’autre : d’abord choisir ce sur quoi on va travailler aller le chercher puis s’y mettre. On travaille plutôt sur ce qui nous frappe, sur ce qui nous excite et ça vient souvent de la perception.

Le procrastinateur s’adonne ainsi à des tâches qui lui permettent de se soustraire à une tâche importante et urgente. Aussi, pour John Perry « afin qu’il soit motivé pour s’acquitter d’une besogne pénible, urgente et importante, il faut que celle-ci lui permette d’éviter une autre besogne plus importante encore. » On pourrait alors résumer la méthode en disant que tout ce qui doit être réellement fait ne devrait pas être en haut de sa liste de tâches.

Plus exactement, vous devriez placer en haut de la liste quelque chose d’encore plus important et urgent, que vous ne ferez pas immédiatement mais que vous finirez peut être par faire un jour quand quelque chose de plus important et urgent aura pris sa place en haut de la liste. En tête de votre liste priorités figure ainsi une tâche qui vous semble ultra-importante mais qui, au fond, ne l’est pas tant que ça mais qui vous motive à accomplir des tâches à priori moins importantes et moins rébarbatives.

Si tout cela vous parait bien farfelu, ne vous étonnez pas. Le philosophe a reçu en 2011 le prix Ig Nobel en Littérature, un Nobel humoristique pour des découvertes insolites, pour son ouvrage. Dans Tracks il estimait toutefois que nombreuses inventions, à commencer par la roue, ont été trouvées par des personnes censées faire tout autre chose ou qui cherchaient comment échapper à une tache bien pénible qui leur était attribuée.

Le propos est donc amusant au premier abord, mais si vous êtes procrastinateur vous pourriez bien vous reconnaître dans ce livre. Peut être alors n’y trouverez pas la méthode pour moins procrastiner, mais au moins y trouverez vous des arguments pour déculpabiliser et justifier votre méthode de travail parfois surprenante.

Vive le bordel et liste de tâches

Peut être aussi allez vous aussi vous reconnaître quand il donne les avantages d’avoir un bureau en pagaille parce que les idées naissent du désordre. Excuse que je donnais à ma maman quand je ne voulais pas ranger ma chambre.

Car en plus d’être procrastinateur il vous explique aussi qu’il est un organisateur horizontal et qu’il faut que tout soit étalé sur son bureau plutôt que soignent rangé dans une pile ou des armoires. Un document rangé dans une chemise disparaît à tout jamais, un mail rangé dans un dossier « Urgent » aussi ! Vous vous reconnaissez ?

Enfin, un mot sur ce qui m’a fait le plus sourire, sa gestion de liste de tâches quotidiennes. C’est un fait, le procrastinateur a besoin de rayer les choses faites pour éprouver un délicieux sentiment de satisfaction. Le procrastinateur est souvent découragé par de trop grosses tâches. La plupart des méthodes de gestion vous incitent donc à les découper en petits morceaux et mesurer votre avancement.

Il propose donc logiquement d’établir une liste de choses pour le plaisir des les barrer. Le contenu de la liste est plus amusant :

  1. Eteindre le réveil,
  2. Ne pas activer le rappel d’alarme,
  3. Se lever,
  4. Se laver,
  5. Ne pas recoucher,
  6. Descendre les escaliers,
  7. Faire du café..

Ainsi si vous suivez sa liste, dès votre café du matin vous avez déjà la gratification d’avoir accompli pas moins de 7 tâches de votre liste avant même d’avoir réellement commencé quoi que ce soit. Une sacrée gratification qui vous donne l’impression d’avoir fait beaucoup et vous motive pour la suite. Sa liste va jusqu’à 13 en fait, avec des points comme ne pas tourner autour de l’ordinateur, ou allumer Word. D’autres sont des tâches à ne pas faire comme ne pas regarder Wikipedia… C’est ce que l’auteur appelle « une stratégie d’automanipulation » pour se rendre productif.

Vous l’aurez compris, si vous êtes procrastinateur je vous encourage à jeter un oeil sur ce livre qui ne vous aidera peut être pas à l’être moins, mais vous fera voir les choses sous un angle différent avec beaucoup d’humour.

— Bertrand

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2 comments… add one
  • Seb Fahrer Avr 14, 2015 @ 12:41

    Je le lirai demain!

  • ON RANGE TOUT Oct 23, 2017 @ 17:06

    Bonjour,
    Merci pour cet article sur la procrastination. J’aime bien l’idée de découper les tâches pour les rendre moins effrayantes. J’aime aussi l’idée de faire des listes qu’on raye au fur et à mesure, cela permet de mesurer notre avancement.

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